Confidente de Jean-Christophe SCHMITT
Aujourd’hui, presque tout m’agresse,
mais mon oreille est encore là
pour le chant délicat des oiseaux.
Mais pour combien de temps encore ?
Ton épaule contre la mienne,
ton souffle sur ma joue.
Je n’ai pas oublié.
Alexandre Romanès, Sur l’épaule de l’ange,
Gallimard, 2011
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nous marchons lentement
dans la rue d’un village
s’ouvre la porte
d’une maison
happés par la lumière
au fond d’un couloir
nous entrons au jardin
et nous dansons avec les guêpes
autour de gerbes d’or.
Christian Garaud, La cigale bien attachée (plus ou moins),
La porte, 2012
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Quelle voie prendre quelle torche éteindre
Et quelle trace suivre après la pluie
Dans la terre qui déjà s’enfonce sous nos pas
Nous marchions souvent
À travers les feuillages
Comme pour rassembler nos souvenirs
Dès la première lueur du jour
Nous marchions à l’aube
Incertains
Battus en brèche
Dans le royaume des fougères
Des lambris
Le royaume des lumières passagères
Thierry Renard, in L’abandon des sources de Guylaine Carrot,
J. André, 2012
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Aux murs, les couleurs provençales
Un gros médaillon tendre comme un biscuit
Rose guimauve et vert anis
En son cœur,
Le bras de François, dans sa manche de bure,
Soutient le bras du Christ échappé des nuées
Deux chauves-souris descendent dans un vol croisé
Françoise Siri, Au cœur de la Roya,
Éditions Henry, 2012
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J’aimerais qu’un jour dans mon cœur
Naisse un arbre épris de soleil
Tous les mots en vain suppliés
Toutes les joies demeurées sans nom
Les peines les plus secrètes
Jailliraient des bourgeons du silence
Et les feuilles qui lisent dans le ciel
Seraient l’image de mes pensées
Mais je n’ai pour vous atteindre
Que la langue des racines
Et les appels muets de la solitude.
Hélène Cadou, Le bonheur du jour, Éditions Bruno Doucey, 2012
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Zélie regarde le monde sur le dos sa mère
elle voit le blé les pommes de terre la faux de sa mère
elle suit les mouvements de son corps s’endort
n’ose pas bouger cligne des yeux baille
elle crie elle a faim arrache sa mère au labeur
s’assoit sur le bord offre le sein elle a froid
Cécile Guivarch, Le cri des mères,
La porte, 2012